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Chronique 1788

Principaux évènements climatiques de l'année 1788 : Orage, Canicule et vague de chaleur, vague de froid

 

Récit de l'orage du 13 juillet 1788

Selon les dires de certains historiens, il s'agirait de l'un des déclencheurs de la révolution Française (un an plus tard) car il serait en partie responsable d'une récolte particulièrement mauvaise et de la famine qui s'en suivi.

 

EN FRANCE

Le 13 juillet 1788, Une vague orageuse d’une ampleur et d’un force rarement observée traverse la France du sud-ouest au nord-est, provoquant l’une des plus grandes catastrophes agricoles de la fin de l’Ancien Régime. Ce phénomène, assimilable aujourd’hui à une supercellule de grêle, a eu un impact national, économique, social et politique.

Dans un après-midi le puissant orage aborde la Sologne et du sud de l’Orléanais (après avoir déjà traversé des centaines de kilomètres depuis les régions du Sud-ouest). Vers 14 heures, un immense nuage noir-vert se forme, annonçant une supercellule. En progressant vers Orléans, l’orage libère ses premières chutes de grêle, déjà assez fortes pour percer des tuiles et blesser des animaux.


Entre 15 et 16 heures, la tempête gagne en violence et traverse l’Orléanais, frappant Meung-sur-Loire, Saint-Jean-de-Braye et Orléans même. Puis, en fin d’après-midi, elle atteint la Beauce, région céréalière essentielle du royaume, où elle atteint sa puissance maximale : les grêlons, parfois gros comme le poing, dévastent totalement les moissons et les vignes en quelques minutes. Les villages de Patay, Artenay, Toury, Auneau ou encore Étampes sont défigurés, les champs broyés, les arbres défeuillés et les toitures criblées.


Entre 17 et 18 heures, la tempête remonte vers l’Essonne, ravageant les cultures autour d’Arpajon et de Corbeil, puis elle arrive aux portes de Paris. La capitale est relativement épargnée, mais ses faubourgs de l’est — Montreuil, Vincennes, Saint-Mandé, Charenton — subissent une chute de grêle très violente qui détruit vergers, jardins et vitres. L’orage contourne Paris et s’engage dans la plaine du Valois.


Entre 19 et 20 heures, il traverse Senlis, Chantilly et Crépy-en-Valois, où les toits et les arbres sont hachés par la grêle. Ensuite, il franchit la frontière du Soissonnais : Soissons, Coucy et Laon rapportent des rues couvertes de glace et de vastes destructions agricoles.

Entre 20 et 22 heures, la tempête s’affaiblit en pénétrant en Picardie, mais elle reste encore assez forte pour endommager les cultures autour de Saint-Quentin.


Enfin, entre 22 heures et minuit, le système orageux atteint le Hainaut, vers Le Cateau et Cambrai. La supercellule se désorganise en entrant sur le territoire des Pays-Bas autrichiens — l’actuelle Belgique — et l’orage s’éteint progressivement dans la nuit.


L’orage du 13 juillet 1788 laisse donc derrière lui une bande de destruction agricole sans précédent. Cet épisode, en ruinant les moissons et en provoquant une crise du pain, contribuera directement à l’atmosphère de tension qui précède la Révolution française.

 

Trajectoire de l'orage à grêle du 13 juillet 1788 selon la Carte de Buache (1790)

 

A PARIS (extrait de journal)

Pendant la matinée du 13, le ciel se couvrit de plus en plus. Vers les huit heures, un vent violent s'éleva, les nuages s'accumulèrent, et amenèrent une grande obscurité. Vers les neuf heures, l'orage se déclara : le vent au sud-ouest ; un tonnerre roulant se fit entendre avec force ; et pendant huit minutes environ il ne mit presque pas d'intervalle entre les coups. La chaleur, avant l'orage, était très incommode, très étouffante sur tout dans les rues ; elle enveloppait, et semblait sortir d'un brasier. La nuée se déclara par une forte grêle qui ne fut pas générale dans Paris; il n'en tomba que des grains fort ordinaires, noyés dans une averse abondante de pluie qui dura depuis huit heures et demie jusqu'à neuf heures et demi, seulement au centre et au midi de Paris ; mais au faubourg Saint-Antoine la grêle fut forte, cassa des vitres et détruisit les légumes. Cet orage fut terrible par ses effets dans différentes provinces de France, où, en moins d'un quart d'heure, il ôta tout espoir de récolte. Tous les pays affectés de cet orage offraient plus que le spectacle de pays totalement ruinés et détruits par la grêle. Tout fut enterré, haché, abimé, déraciné; les toits découverts, les vitres brisées, les vaches et les moutons tués ou blessés ; le gibier, la volaille périrent. Plusieurs habitants, hommes et femmes reçurent de dangereuses contusions. Le comte de Merci, ambassadeur de l'Empire, eut sept cents carreaux de vitres cassés à son château de sa terre de Chènevière, à quatre lieues de Versailles. Cet orage se passa sous les yeux du Roi et de Monsieur qui étaient à Rambouillet.
Sa majesté connaissant toute la perte que faisaient les Français dans les différentes provinces par où l'orage destructeur avait passé, fit rendre un arrêt en son conseil d'état, daté du 26 juillet, pour une création d'une loterie de douze millions en faveur des provinces dévastées et ravagées par cette grêle. Cet orage, avant d'arriver à Paris, avait ruiné le Poitou, la Touraine, la Beauce, le pays Chartrain, avait continué sa route à travers l'Ile-de-France, la Picardie et la Flandre.

 

Trajectoire présumée de l'orage sur le Royaume de France entre la nuit du 12 au 13 juillet 1788 (Sud-ouest) et la journée du 13 juillet 1788 entre le Centre et la Belgique). 

 

    

 

Photo de Guillaume SECHETHistoire du site Météo Rouen